Modélisation BIM 3D du parfait jumeau numérique de mon immeuble
La modélisation BIM 3D (Building Information Modelisation) consiste à créer une représentation graphique d’un bâtiment ou d’infrastructures en 3D, en y intégrant la géométrie de l’édifice d’une part, et les qualités physiques et fonctionnelles de chacun de ses objets d’autre part : mur, escalier, toit , couleur …
Les objets numériques et les informations techniques de cet ouvrage, qui forment une base de données, sont accessibles à tous les acteurs dès lors qu’elles s’inscrivent dans le référentiel IFC (Industry Foundation Classes).
La maquette numérique est-elle le parfait jumeau numérique de mon bâtiment ?
La réponse est non ! Il n’est pas nécessaire d’établir une maquette numérique parfaitement identique au bâtiment. Une forme géométrique légèrement simplifiée et bien « sémantisée » (documentée) sera beaucoup plus pertinente pour les usages de ses utilisateurs.
En ce qui concerne la forme géométrique, le modeleur interprète la réalité de son œuvre numérique en la simplifiant pour plusieurs raisons :
- Plus on restitue de détails géométriques, plus le traitement des informations est long. L’ingénieur ou le technicien crée la maquette numérique optimale pour que chaque acteur puisse réaliser ses missions : établir les quantités nécessaires, effectuer les calculs de structure, mesurer l’impact carbone, assurer l’exploitation et la maintenance … L’exactitude de la maquette n’est pas un objectif en soi. La maquette est un outil pour mener une mission, comme le crayon de l’architecte.
- Nous sommes encore limités par les capacités techniques de calculs des processeurs graphiques. Le nombre de calculs ne dépend pas de la taille d’un objet, mais de son nombre de faces. A titre d’illustration, chaque manipulation d’un objet de 120 faces simulant une petite balle ronde nécessite 20 fois plus de calculs que pour un mur de 2 m2 qui n’est représenté que par 6 faces.
Quel est le Niveau de Détail NOD – Level Of Detail LOD – utile pour une maquette numérique ?
Est-il nécessaire de faire figurer les briques une par une, lorsqu’il s’agit d’un mur de briques ? La réponse, là encore, est non ! L’objet que représente ce mur composé de briques, peut être représenté par une forme géométrique aux dimensions fidèles et qui ne détaille pas les composants, mais à laquelle on peut rattacher toutes sortes de données physiques et mécaniques, les propriétés, les caractéristiques : les matériaux, l’inertie thermique, la certification, la qualité bio-sourcé …
Est-il utile de modéliser les fixations et les câbles de soutien du plafond suspendu ? Est-il nécessaire de modéliser les joints du carrelage ? Les spécialistes du BIM ont tenté d’établir des règles à partir des spécifications. On peut retrouver deux études sur le sujet :
- La première intitulée « bim/maquette numérique contenu et niveaux de développement» réalisée par Syntec-Ingénierie et Le Moniteur, aborde le niveau de développement, le degré de détails attendu quant à la géométrie et la description des données du modèle 3D (étude du 9 mai 2014 éditée par Le Moniteur n° 5763, Cahier détaché n°2 consultable en ligne : https://www.syntec-ingenierie.fr/wp-content/uploads/2019/06/2014-05-09-cahier-moniteur-bim-maquette-contenu-niveau-developpement.pdf).
- L’autre aborde les Spécifications des Level Of Development pour spécifier et articuler avec précision et clarté le contenu des maquettes en fonction des phases d’avancement du projet. L’étude Level Of Development Specification for building information models, part i, guide & commentary december 2021, Committee Co-Chairs Jim Bedrick from FAIA, Will Ikerd, PhD, PE and Jan Reinhardt, Phd est en ligne : https://bimforum.org/resources/Documents/LOD%20Spec%202021%20Part%20I%20-%20FINAL%202021-12-28.pdf
Il n’y a pas selon moi de réponse unique à ces questions. Le niveau de détail de la modélisation est celui qui permet de répondre aux usages que l’on en attend. L’idée que l’on peut retenir est que chaque groupe de professionnels (ingénieur génie civil, architecte, économiste, ingénieur fluide, cvc …) connaît parfaitement ses besoins par phases et par mission, et que ce sont donc ces besoins qui vont présider au niveau de détail géométrique de la maquette. Ces questions étaient déjà posées sous d’autres formes avant même que le BIM n’existe. Pour autant, les plans, les détails et coupes 2D que nous livrons depuis des décennies sont tous calés sur le niveau de détail dont nous avons besoin.
Pour définir le niveau de détail, l’objet en 3D doit être suffisamment précis et caractérisé pour en extraire les livrables contractuels en plans 2D. Nos plans 2D extraits sont a minima aussi qualitatifs que nos livrables habituels. Cela suffit pour remplir nos obligations métier, assurer les principales études et pour que chaque acteur soit en mesure d’assumer son niveau de responsabilités.
Existe-t-il un niveau d’informations – Level Of Information LOI – standard des données et des propriétés indiquées dans la maquette ?
Illustration : Maquette numérique BIM : la géométrie de l’amphithéâtre est assortie des données et caractéristiques techniques et fonctionnelles de chaque objet. Ici les données rattachées à chaque objet est identifié par une couleur. Image @adatt 2021
Chaque objet 3D qui compose la maquette numérique est renseigné de données sémantiques et alphanumériques telles que le coefficient thermique d’un mur, la couleur de la peinture d’une pièce, le code produit d’un fabriquant ou l’impact Carbone par exemple. Ces renseignements sont nécessaires pour mener les études et consulter les entreprises.
Quelles sont les données à renseigner dans une maquette numérique ? Dans la réalité, il n’y a pas de limite à ces données. Si des chercheurs ont tenté de normaliser ce Level Of Information, aujourd’hui, en 2022, les maîtres d’ouvrages n’ont pas précisé d’exigences pour les contrats BIM.
Cela étant, nous savons sélectionner les données renseignées en fonction des besoins spécifiques des parties prenantes d’une opération. Nous pouvons associer ces données à des modèles de calcul mathématique éprouvés pour créer de nouvelles datas. A titre d’exemple, le fait de modéliser une pièce génère un tableau de surface utile.
Les livrables tels que l’estimation, les calculs thermiques, les calculs de structure, les quantités et tableaux de surface, tableaux de finition des menuiseries et des portes … sont extraits de la maquette numérique pour être livrés au maître d’ouvrage ou aux entreprises en format pdf ou Excel.
Si le client n’a pas de demande particulière, ces données peuvent être retirées de la maquette numérique avant sa diffusion et après les calculs.
Simulations. Enfin, à partir de ces éléments de géométrie, du choix des objets et des renseignements de chacun de ces objets, nous créons une « maquette numérique paramétrable » avec laquelle nous allons simuler des variantes en temps réel, en modifiant par exemple les exigences environnementales, la géométrie et coût de travaux. En 2021, adatt a réalisé une mission d’analyse économique de ce type pour l’Établissement Public d’Aménagement EPA Senart. Cette étude a permis à l’aménageur de recueillir des indicateurs de prix en fonction des exigences environnementales attendues pour la construction d’un bâtiment de logements collectifs et individuels avec parking.
Pourquoi respecter les normes IFC (Industry Foundation Classes) ?
La norme IFC définit la façon dont l’information doit être structurée pour être correctement lue et interprétée par les différents acteurs. Elle garantit l’interopérabilité entre les logiciels de maquette numérique. C’est aussi la norme IFC qui permet d’affecter un objet à l’univers de la construction et pas, par exemple, à l’univers du dessin animé 3D, alors même que le logiciel 3DSMax présente un niveau de fonctionnalités de modélisation exceptionnel.
Le format IFC initié dès 1997 est devenu en 2013 la norme internationale mondiale pour le partage des données dans le secteur de la construction. Ainsi, un mur modélisé avec un logiciel source, est extrait en IFC sous code « IFCWALL » afin d’être partagé entre les acteurs du projet, quel que soit leur logiciel de travail. Le format IFC est libre et indépendant des solutions logicielles payantes. Depuis 1996, c’est l’association buildingSMART (ex. IAI International Alliance for Interoperability) qui la développe et la perfectionne en associant les BET, les entreprises de la construction et les éditeurs de logiciels.
A ce jour, la norme IFC comporte 800 classes d’objets. Elle permet d’échanger presque toutes les données d’un projet : le site, les équipements, les relations avec les autres objets, ainsi que les propriétés des objets, comme par exemple une voile percée par une ouverture remplie par une menuiserie.